Jason Denzel, contributeur sur le site de Tor Books (l’éditeur américain de la Roue du Temps), fondateur de DragonMount.com (premier site anglophone sur la Roue du Temps) et lui-même écrivain, a eu la chance de lire A Memory of Light en avant première. Il a donné ses impressions sur son blog sous la forme d’une lettre écrite à Robert Jordan.
Merci à Rhav’ pour la traduction de cette lettre parue le 24 septembre 2012, que vous pouvez retrouver en intégralité ci-dessous!
Version originale : http://www.tor.com/blogs/2012/09/qdear-robert-jordanq-a-response-to-a-memory-of-light#more
“Cher Robert Jordan, une réponse à “A Memory of Light”
Cher Robert Jordan,
Aujourd’hui j’ai lu votre livre final. La fin de La Roue du Temps est arrivée entre mes mains pratiquement vingt ans après en avoir découvert le premier tome. C’était une histoire bien écrite, une histoire dont la fin a rempli les promesses faites il y a si longtemps. J’écris aujourd’hui pour vous en parler un peu.
Ce que j’ai le plus aimé dans votre grande histoire, au cours de toutes ces années, c’est combien elle reste crédible, cohérente. Au sein de cette histoire sur des personnages fictifs, dans un monde fictif, avec des conflits qui n’ont jamais vraiment eu lieux, nous avons l’opportunité d’explorer ce qui fait de nous des gens réels. La Roue du Temps a, à mon sens et j’imagine à celui de milliers d’autres, remplis ce rôle bien mieux que n’importe quelle autre oeuvre du genre. L’une de ses leçons les plus fondamentales réside dans le fait que le temps est une roue et que les fins ne sont que de nouveaux recommencements si l’on a le courage de se retourner et regarder dans l’autre sens.
Quand vous êtes décédé, j’ai eu le privilège de visiter votre maison, votre Charleston, vos Deux Rivières. Je me suis assis dans votre chaise et ai porté le regard sur vos livres bien aimés. J’ai respiré l’air que vous respiriez, et j’ai pu avoir un aperçu de vous. J’ai rencontré vos amis et votre famille, et vu comment ils définissaient une autre partie. Et aujourd’hui, alors que je lisais la fin de votre série fleuve, je retrouvais encore de vous. Dans ces moments de finalité, ces moments de beauté, je compris, les larmes aux yeux. Je compris pourquoi vous vouliez écrire cette histoire. Je compris le pourquoi de ce que vous tentiez de faire. Et j’ai ris. Ce ne sera peut-être pas ce que les gens attendent, mais, pour reprendre Stephen King, il s’agit ici de la fin adéquate.
Et une fin glorieuse.
La série de La Roue du Temps est terminée pour moi. Je ne nie pas éprouver des émotions aigres-douces. Mais une fin puissante donne plus de sens au voyage qui lui a précédé. Je peux bien sûr noter quelques petites nuances dans ce livre final qui n’étaient pas parfaites. Certaines parties également ne sonnent pas aussi vraies qu’elles l’auraient pu. Mais dans sa globalité, cela reste une grande, très grande oeuvre.
Si seulement vous aviez pu voir de quelle manière tout cela a fini. J’ai aimé la fin de chaque personnage, même quand cela m’a fait pleurer. J’ai célébré les victoires et suis resté sans voix face aux défaites brutales. Rand et Egwene sont ceux qui sortent le plus du lot, mais c’est ce que je souhaitais et attendais. Et il y a CE chapitre. Par la lumière, RJ, 50 000 mots ? Vraiment ? Ouah.
Vous n’avez jamais rencontré Brandon Sanderson ; très probablement même jamais entendu son nom de toute votre vie. Mais je peux vous le dire, RJ, il a accomplis un travail fantastique. Il fut votre hérault et il porta votre bannière fièrement jusque dans le gouffre du Shayol Ghul pour s’assurer que l’oblivion ne viendrait jamais consumer la fin de la série. Vous auriez été tellement fier de lui. En ce qui me concerne, je le suis. De nombreux fans également. Si vous le rencontrez un jour, quelque part, dans une autre vie et/ou une autre époque, donnez-lui une poignée de mains chaleureuse en remerciement, “and buy him a beer some Magic cards” (désolé, là, il doit y avoir une référence qui m’échappe).
Il vous faut également savoir que Maria et Alan, vos assistants, vous sont restés fidèles jusqu’au bout. Pendant 5 ans, ils ont péniblement étudié, analysé, corrigé et mais au final, aimé cet ultime livre. Durant ma lecture, je pouvais distinguer clairement leur influence et je leur suis tellement reconnaissant pour cela. Sans eux, ce final n’aurait pas été aussi bon. Si tant qu’il aurait pu être bon sans eux…
Les fans eux aussi ont joué leur rôle. Une partie d’entre eux a aidé à la continuité, et une plus grande honore votre travail jour après jour à travers leurs efforts pour la communauté et la franchise. Et un autre encore, le plus grand, éparpillé à travers le monde, qui regroupe tous les fans qui vivent et respirent au rythme de votre travail. Ils le partagent avec leurs amis. Ils font de leur mieux pour vivre en suivant vos enseignement. Ils chérissent votre mémoire et lisent vos livres à leurs enfants. Ils sont la preuve même que la Fantasy peut inspirer des gens de n’importe quelle nationalité, religion ou courant politique et les faire se mettre d’accord sur quelque chose de cher à leur coeur.
Vos différentes maisons d’édition ont honoré votre mémoire en imprimant vos livres, et en renouvellant continuellement les peintures (littéralement, dans le cas des couvertures) sur cette série. Ils ont parfois fait face à la critique, mais au final, vous ont rendu fier. Tom Doherty et son équipe ont dirigé tout cela. J’ai parlé à Tom il y a peu et il m’a rappelé qu’il fait tout cela parce qu’il était un de vos fans et amis.
Enfin, et je pense, ce qui a le plus d’importance, je veux que vous sachiez que Harriet n’a été rien moins que fantastique. Vous le savez déjà d’une manière que je n’ai pas besoin de décrire, mais son amour pour vous est une leçon en soi. Elle a travaillé sans ménager sa peine depuis votre décès pour finir ce livre. Elle a été votre capitaine et a tenu la barre pour ramener le bateau à bon port. La prochaine fois que je la verrais, je l’embrasserai de votre part. Et je pense que de nombreux fans voudraient faire de même.
Ce qu’il y a de plus extraordinaire chez tous ces gens, de Harriet à tous les fans à travers le monde, c’est qu’ils font ressortir le coeur, l’essence même de ce livre. Ils prouvent que la vie imite véritablement l’art et vice versa. La Roue du Temps a commencé avec vous, avec un homme simplement en train de marcher dans un couloir en ruines. Mais à la fin, votre série s’est révélée plus grande que vous, plus grande que cet homme et son successeur.
Votre histoire est une histoire d’Eres. Certains pourront la critiquer ou chercher à la diminuer, mais rien ne pourra entamer ou écorner sa portée et son influence. Les dernières pages sont peut-être écrites, mais le livre vivra dans nos mémoire, dans la communauté et (regardons la vérité en face) dans les franchises qu’il fera naître. Il n’y a ni commencement ni fin, n’est-ce pas ?
Et c’est ainsi, RJ, alors que je fini d’écrire cette lettre que vous ne lirez jamais, qu’il ne me reste plus qu’à vous exprimer mes ultimes remerciements. Merci pour avoir partagé votre vision avec moi. Avec nous tous. Malgré tout le succès mondial et l’attention que ce livre apportera, il continue de me parler à un niveau intime, personnel. Merci pour avoir exprimé la beauté de votre vie dans ces pages. Merci pour nous avoir donné ce qui est tout simplement la fin la plus épique qui soit à la plus grande saga de notre temps.
Merci de nous avoir emmené dans cette chevauchée sur le souffle du temps.
En toute sincérité, je reste,
Votre Ami,
Jason Denzel
Jason@dragonmount.com”