La Roue du Temps, une vision du renouveau [Alerte spoiler]

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L’ambivalence du progrès en fantasy

  • des êtres bestiaux qui détruisent une forêt primaire dans les flammes de l’industrie.
  • des généticiens qui avilissent la vie sauvage pour en faire une armée monstrueuse.
  • le retour d’un roi, prophétisé ou non, qui remet le monde en ordre.

Trois synopsis très présents en fantasy, n’importe quel lecteur pouvant associer l’un d’entre eux à des œuvres qu’il connait.

Trois formes de représentation négative du progrès et de ce qu’il apporte.

  • la découverte de nouvelles possibilités magiques ou technologiques qui améliorent la vie de la population.
  • une découverte des origines du monde qui permet de sortir des anciens dogmes et idées reçues, pour découvrir une réalité plus complexe encore.
  • Le renversement des tyrans anciens dont la chute permet de créer un monde plus juste et inclusif.

Trois histoires très présentes en fantasy. N’importe quel lecteur pouvant y associer une ou plusieurs œuvres.

Trois formes de représentation positive du progrès et de ce qu’il apporte.

Diverses visions du progrès technique, scientifique et/ou social a la limite de l’antithétique. Pourtant chacune de ces formes se retrouve en fantasy parfois dans la même œuvre. Ceci montre parfaitement la profonde dichotomie entre un genre inscrit dans un passé technologique et social mais qui reste pourtant porteur d’une grande potentialité d’expérimentation littéraire sur ces notions.

Le cas de la Roue du Temps

Temps circulaire : une ancienne vision du temps…

Contrairement à un grand nombre d’œuvre de fantasy classique, la Roue du Temps fait le choix de se tourner vers de multiples philosophies orientales dans la construction de son monde. En effet, à travers la figure du temps circulaire et non linéaire ainsi que par la place de la réincarnation, c’est toute les fondations de son univers qui sont impactées. Cela lui donne une coloration rarement vue dans la fantasy et plus généralement dans les œuvre du genre merveilleux.

Pourtant si l’idée de la réincarnation est un concept qui est depuis longtemps l’apanage du sous continent indien, ce n’est pas le cas du temps circulaire. En réalité, l’idée même d’un temps qui avance et qui n’est pas un renouveau perpétuel est certes occidental, mais il est surtout très récent. De fait, ce temps qui “progresse” est la base même de la valorisation contemporaine du progrès. Celui-ci est apparu au 18e siècle, consubstantiel des Lumières et pendant longtemps hegelien dans l’âme. La conception occidentale du temps est celle d’un progrès (il s’agit d’une conception théorique, la pertinence du progrès en question n’est pas notre sujet dans cet article !).

Ainsi, la Roue du Temps devient, par sa simple utilisation du temps circulaire, l’antithèse de l’idée du progrès. Nous pouvons aussi ajouter, que comme bien des œuvres de fantasy, le monde de la Roue est en apparent déclin. L’orgueil de l’humanité ayant causé la chute de l’Age des légendes, une ère des plus prospères et, peut être, des plus justes. Ces quelques éléments sur la Roue du Temps devraient induire une œuvre anti progrès, presque traditionaliste. Pourtant comme souvent la réalité est bien plus complexe.

… source de l’évolution d’un monde.

La figure du dragon réincarné, un humain qui se souvient de ses vie passées, confère à l’œuvre deux nuances importantes. La première est un analogisme : le Dragon, tout comme les Aiels par ailleurs, connait le passé lointain. Ou plutôt il le redécouvre et ainsi progresse dans son savoir. Deuxièmement ce savoir nouvellement acquis devient, dans la Roue du Temps, un outil pour réussir là ou l’ancien Dragon, et par extension l’ancienne humanité a échoué. Par exemple l’emprisonnement du ténébreux par Rand réussit seulement grâce à sa connaissance des erreurs commises par Lews Therin Thelamon et lui permet de les éviter.

Un progrès scientifique aussi valorisé que dangereux.

Des peurs réelles…

Comme souvent en fantasy, et ce depuis Tolkien, l’humanité, qui se prit pour le créateur donna naissance elle-même à ses pire maux, ici les créatures des ténèbres. Le rejeté Aginor, généticien des plus doué, est la source de ces créatures hybrides. Ainsi les Trolloc et autres Myrdraal deviennent l’incarnation d’une des pire dérives de la science dans l’esprit d’un chrétien, la manipulation génétique de l’Homme. En effet Jordan, est anglican épiscopalien, et de ce fait surement influencé par sa foi.

…n’empêchant pas le progrès…

Pourtant, si on enlève cet exemple du progrès scientifique, lié a de grands problèmes éthiques, le point de vue de la Roue du Temps sur la science est des plus positif.

  • Premièrement, la découverte de nouvelles capacités à travers le pouvoir de l’Unique, et, surtout leur utilisation massive par les protagonistes est un symbole de confiance envers le progrès scientifique. Cette confiance est autant présente dans les domaines civils que militaires. Ainsi le Cuendillar, la Pierre Cœur, sera industriellement fabriquée avec pour précepte des théories presque fordiennes. De même les personnages useront et abuseront de la possibilité de voyager. Toute les nouvelles méthodes de guérison découvertes seront testées. De nouveau ter’Angreal seront fabriqués et même les Adam reproduits en masse, quand bien même l’horreur de ces objets est connue.
  • Deuxièmement ce qui est vrai pour le Pouvoir de l’Unique l’est aussi pour la science classique. Ainsi, nous voyons dans les romans l’invention de machines presque steampunk au Cairhien. Sans oublier les nombreuse innovation militaires, tel les œufs de dragon et le perfectionnement des arbalètes, qui parsèment la série.
  • Enfin, et plus étonnamment, l’auteur, à l’inverse de bien de ses contemporains, fait confiance en l’humanité dans son utilisation d’arme de destruction massive. Ainsi lors de l’Age des légendes les forces de la lumière comme celle des ténèbres refusèrent d’utiliser les torrents de feu. Cette arme équivalente dans la Roue du Temps à la bombe atomique, capable de soustraire ce qu’elle vise à la trame et ce faisant de la détruire progressivement, sera considérée comme trop dangereuse pour être utilisée. C’est peut être un parallèle abusif mais le travail de Robert Jordan en temps qu’ingénieur sur des porte-avions nucléaire peut expliquer cela, lui donnant le sentiment que ce qui est connu peut être maitrisé.

…dans un monde qui se développait déjà.

Le niveau de technologie de la Roue du Temps est analogue a celui de la Renaissance, selon RJ lui-même. Contrairement à de nombreuses autres œuvres classiques, il apparaît que l’ensemble des habitants savent lire et écrire. De plus a l’inverse de beaucoup d’ouvrage de Fantasy cette technologie n’est pas en stagnation et encore moins en déclin. Au contraire les visions de Rand à Rhuidean nous apprennent que, certes, le niveau scientifique général est bien plus faible que pendant l’Age des Légendes, mais il reste plus élevé qu’après la Dislocation du monde.

A cette argument là, on peut m’opposer le lent déclin de la connaissance du Pouvoirs de l’Unique. Mais ce cas précis, bien que documenté dans l’œuvre, est différente pour deux raisons : l’implication méthodique de l’Ajah Noir dans l’affaiblissement de la Tour Blanche, ainsi que l’immobilisme classique d’une organisation tri-millenaire sans influence extérieure, expliquent en grande partie la chute de savoirs au sein de la Tour Blanche.

Une réelle transformation sociétale, au prix de compromis.

Panorama des systèmes politiques.

Disons le tout de suite, aucun système politique de Roue du Temps ne peut s’apparenter a une démocratie moderne. Pourtant cela ne peut être vu comme choquant vu la faible prévalence des sociétés démocratiques dans notre histoire. Surtout que Robert Jordan refuse l’essentialisation du gouvernement médiéval ou moderne (au sens historique du terme, c’est à dire la Renaissance) à un système monarchique traditionnel. Au contraire l’auteur teste de multiples types de système politique, passant du système tribal des Aiels, dont nous reparlerons, à la monarchie élective en Andor (ce qui était de fait le système monarchique des royaumes Francs au Haut Moyen-Âge), en passant par l’oligarchie de Tear et la diarchie élective du Tarabon.

Ainsi dans la Roue du Temps nous trouvons :
  • L’Altara, association d’une cité Etat et de petit fiefs théoriquement rattachés à la couronne d’Ebou Dar.
  • L’Amadicia, officiellement état monarchique, officieusement dictature militaro-religieuse dirigée par les Fils de la Lumière a partir d’Amador.
  • L’Andor, monarchie matrimoniale et élective. Les électeurs étant les 19 principales maisons nobles du royaume qui choisissent en leur sein la reine qui siège à Caemlyn.
  • L’Arad Doman, monarque secondé par le Conseil des marchands a partir de Bandar Eban.
  • Caihrien, monarchie absolue du roi qui règne depuis la ville eponyme (inspiré de la France de Louis XIV et du système chinois).
  • Les tribus Aiels, association de 12 tribus habitant la Tierce Terre. Chacune d’entre elle est dirigée par un “chef”, secondé de matriarches, et des maitresses des toit, l’héritage des terres y étant matrilinéaire.
  • Far Madding, cité état dirigé par le conseil des Treize, présidé par la Première Conseillère, première parmi les égaux.
  • Le Peuple de la mer, système pyramidal dirigé par une maitresse des navirs, élue par les 12 maitresses des vagues, elles même élues par les maitresses des voiles. Les maitresses des voiles étant les capitaine de vaisseaux du peuple de la mer.
  • L’Illian, dirigé à partir de la ville du même nom. L’Illian voit son pouvoir séparé entre le Roi, le Conseil des Neuf, l’Assemblée des Marchands et des capitaines, chacun des groupes essayant de tirer la couverture à soi….
  • Les principautés frontalières : Kandor, Shienar, Saldaea, Arafel, sont quatre monarchies militaristes focalisés sur la guerre contre les Ténèbres.
  • Le Seanchan, système impérial dynastique, esclavagiste et bureaucratique.
  • Tar valon, Cité état dirigé par la chaire d’Amyrlin et le Hall de la Tour, équivalant des état pontificaux dont le dirigeant peut venir de n’importe quel région du monde.
  • Tarabon, dyarchie élective, le pouvoir est séparé entre le roi et la Panarch, tous deux élu par l’assemblée des seigneurs dont c’est la seule prérogative.
  • Tear. Oligarchie seigneuriale basé sur les environs de la ville eponyme.

Un ensemble de variations politiques

A partir de cette énumération nous pouvons retirer quelque informations. Premièrement la Roue du Temps comporte une prévalence de société comportant plusieurs organes décisionnels. En effet a l’exception des principautés frontalières, du Seanchan et dans une moindre mesure de l’Andor et du Cairhien. Aucun État ne possède de dirigeant “absolu”, occupant seul le pouvoir. Deuxièmement un nombre conséquent d’États possèdent un système matriarcal ou tout du moins matrilinéaire. Pourtant, malgré ces deux tendance plutôt “progressistes”, on remarque une certaine tendances à l’autoritarisme dans les livres de Jordan. L’exemple le plus prégnant étant le territoire de deux-Rivières, Petit territoire à l’origine dirigé presque démocratiquement par divers conseils de village et cercle des femme, ces habitant finiront par être assujettis, bon gré mal gré, a Perrin qui deviendra leur suzerain. Le fait que cela ne soit pas du fait de sa volonté mais de celle de Faile ne change rien.

Des transformation sociétales dans la série

Des faits…

A travers ces 14 volume principaux la Roue du Temps, nous entrons dans un monde un mouvement. Ainsi la situation des différents systèmes sociétaux évolueront tout du long de la série.

Parmi ces multiples changements plusieurs me semblent particulièrement intéressants. Avant toute chose, précisons qu’à la toute fin de la série, la démocratie de l’Age des légende n’a pas reparu. De même hors des visions d’Aviendha, nous avons peu d’informations sur les devenir du monde après la fin des romans. Pourtant nous pouvons établir certaines transformations sociétales non négligeables.

Premièrement non pouvons rapidement établir que Robert Jordan est ce que l’on pourrait appeler, en matière de “politique internationale”, positivement un réaliste et péjorativement un realo. Ainsi la nécessaire alliance des forces du Dragon avec les Seanchanien empêche toute remise en cause de l’esclavage à court terme. De fait malgré l’horreur que la chose inspire à la plupart des héros, la nécessité fait loi et le système de l’Empire ne sera modifié qu’au marge.

Deuxièmement, la fragmentation politique du monde de la roue du temps semble être en voie d’atténuation. Ainsi la paix du dragon imposée par Rand dans le dernier tome semble introduire un retour au pouvoirs mondial qui régissait l’Age des légende.

Troisièmement, le pouvoir de l’unique est de nouveaux exercé équitablement entre hommes et femmes. Après un long temps de domination féminine sur la chose les hommes peuvent de nouveau le maitriser en sécurité.

…jusqu’aux conclusions

Ces deux dernières affirmations peuvent être qualifiées de réactionnaire dans le sens étymologique de la chose. C’est ainsi la marque d’un retour au temps ancien, pourtant loin d’avoir la connotation négative que ce mot a de nos jours. Cette tendance est consubstantielle au temps circulaire de la série. Ainsi dans la Roue du Temps comme dans la majorité des sociétés prémodernes, le cycle est au renouveau. Pourtant là ou les sociétés traditionalistes usent de l’ancien pour légitimer le nouveau, la Roue du Temps use plutôt de l’argument de la renaissance. Plus précisément Robert Jordan reprend comme beaucoup d’auteurs de fantasy l’historiographie de son temps. Celle-ci théorise l’idée d’une antiquité de progrès suivi par un Age sombre médiéval qui ne s’arrêtera que par la Renaissance du 16e siècle. (N’oubliez pas que Robert Jordan parle lui même de 18e siècle pour qualifier pour son monde.) (précision : cette vision des différentes périodes historiques est évidemment fausse, la période médiévale était tout sauf un âge sombre unifié)

Le mot de la fin.

Tandis que l’adaptation de la Roue du Temps cartonne dans le monde anglo-saxon, beaucoup de médias, focalisés sur la place de la femme dans la série, l’ont jugée avant-gardiste. Cela est vrai. Pour autant, le monde de Robert Jordan demeure, par de nombreux aspects, inscrit dans l’époque de son écriture (qui commence dans les années 1980). Avec, par exemple, l’idée que les hommes sont en moyenne plus puissants que les femmes dans le pouvoir de l’Unique, reproduisant pour RJ la différence moyenne de force physique.

Le deuxième mot de la fin

La série, de par son ampleur colossale, pourrait me permettre de gloser encore des heures durant à son sujet. Mais là n’est pas le but de cette article. Sa vocation est plutôt de rendre plus prégnante encore la complexité et l’ambivalence de l’œuvre de Robert Jordan, objet littéraire immense par sa longueur sa complexité et son impact sur la fantasy contemporaine.

Article relu et corrigé par Saidor. Merci a lui🙂

3 réflexions au sujet de “La Roue du Temps, une vision du renouveau [Alerte spoiler]”

  1. Je crois que les médias qui jugent avant-gardiste le rôle proéminent donné aux femmes passe à côté d’un point à mon sens fondamental dans la Roue du temps (mais qui n’a probablement pas été rendu dans la série).

    En effet, les femmes jouent un rôle éminent et souvent dominateur non seulement dans l’organisation du Pouvoir unique mais aussi dans l’organisation hiérarchique de nombreuses sociétés. Mais il ne s’agit pas d’une validation de l’idée reçue classique selon lesquelles les femmes feraient de meilleurs dirigeants que les hommes. Les femmes jouent ce rôle pour des raisons historiques liées principalement à la flétrissure de Saïdar à l’origine de la destruction du monde. La Tour blanche est le symbole le plus proéminent de la notion de puissance, et elle est uniquement composée de femmes, puisque les hommes n’ont plus le droit de manipuler le Pouvoir unique. C’est cet état de fait qui a vraisemblablement paré les femmes de prestige et probablement d’une supériorité morale induite, qui se retrouve jusque dans la vision du monde du conseil des femmes à Emond’s Field.

    Mais le fait le plus souvent ignoré est que Jordan montre que les femmes ne sont pas intrinsèquement supérieures aux hommes, ni dans l’exercice du pouvoir politique, ni dans la vie de tous les jours. Jordan décrit des femmes qui peuvent être insupportables, des femmes qui abusent de leur pouvoir, des femmes qui mentent, manipulent et tuent pour leur propre bénéfice, etc. Bref, des femmes qui se comportent comme des hommes devant l’exercice de toute forme de pouvoir, de la plus humble à la plus absolue, et ce pour une raison simple : l’exercice de toute forme de pouvoir corrompt (on retrouve aussi ça chez Tolkien, bien sûr, avec l’anneau unique).

    C’est pourquoi le féminisme manifesté par Jordan dans la Roue du temps doit être modéré d’un côté (parce que beaucoup des femmes qu’il dépeint sont présentées de façon peu flatteuse, pour rester dans l’euphémisme), et en même temps souligné parce que, justement, Jordan décrit les femmes comme des êtres humains, dans toute leur complexité et non pas de façon manichéenne dans une optique féministe à courte vue.

    C’est dans cette optique, par exemple, que Jordan utilise souvent des clichés inversés, comme lorsqu’il fait dire à certaines femmes que les hommes ne peuvent pas s’empêcher de bavarder et de colporter des ragots, un cliché souvent utilisé pour décrire les femmes dans nos sociétés. Autre exemple, lorsque Mat se retrouve malgré lui sous l’emprise de Tylin qui en fait un objet sexuel, c’est là aussi une inversion d’un thème où le rôle du dominant est généralement occupé par un homme dans notre histoire. Autre exemple encore, la relation entre Nynaeve et Lan notamment, où, d’un commun accord, c’est Nynaeve qui « dirige » le couple lorsqu’ils sont en public, et Lan en privé : c’est l’exact opposé de la situation traditionnelle du mariage dans une large partie du monde musulman aujourd’hui, où la femme est supposée obéir à son mari en public et où c’est elle qui commande à la maison.

    Ces inversions multiples montrent bien que, placées dans des situations de pouvoir et de domination comparables à celles qu’occupent les hommes dans nos sociétés, les femmes agissent très exactement comme les hommes : indépendamment des qualités intrinsèques d’une personne, qui jouent à la marge dans son rapport au pouvoir, la règle générale est que l’exercice du pouvoir joue un rôle corrupteur auquel il est difficile de résister.

    D’où un constat qui peut sembler paradoxal : à mon sens, l’univers de Jordan repose sur une conception absolument égalitaire de l’homme et de la femme. Il ne porte pas de jugement moral d’ordre général, il met en évidence des systèmes, des processus aux prises avec lesquels chacun et chacune se retrouve. Et les réactions sont variées : on pense par exemple à Tuon, héritière d’un système particulièrement rigide, qui se montre malgré tout ouverte à l’influence de son mari de fortune, Mat, et montre par là même une aptitude au changement qui, on le devine, jouera un rôle dans l’évolution du Seanchan après Tarmon Gaïdon. Hommes ou femmes, beaucoup de personnages évoluent radicalement, en bien ou en mal, là encore en l’absence de tout parti pris moral du type « les femmes sont supérieures aux hommes dans l’exercice du pouvoir », ou la vue opposée, « les femmes n’ont rien à faire dans l’exercice du pouvoir ».

    Et au bout du compte, c’est aussi cela qui ménage une place si importante à la possibilité de renouveau présentée dans l’article : Jordan offre le libre-arbitre à ses personnages, dans la limite des contraintes exercées par le système politique et social. La conception cyclique de l’histoire n’implique pas l’existence d’un carcan déterministe au niveau individuel. On pourrait extrapoler en y voyant l’idée selon laquelle les agissements individuels n’ont aucune influence sur le déroulement de l’histoire, mais c’est un autre sujet.

    Merci beaucoup pour cet article !

  2. Merci pour vos commentaires !
    Pour mani, ta réflexion est très intéressante mais je n’est pas voulu m’appesentire sur cette question de la place de la femme dans l’œuvre pour deux raisons.
    Premièrement, cela mérite un article dédié.
    Deuxièmement, je ne voulais pas ” masquait” le reste de mon sujet, par ce débat qui revient souvent sur le féminisme de l’oeuvre.
    Personnellement ce que je retient ces que l’ouvre peut être aussi bien perçut comme mysogine que “woke” ce que je trouve en réalité plutôt flatteur quand a sa complexité.

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